Dans son sillage, un parfum de scandale. Jörg Haider, le leader de l'extrême droite autrichienne, a ouvertement reconnu son oeuvre comme "vile" et "immorale". À la veille des élections législatives en Autriche, en 1995, on pouvait lire ces affiches sur les murs des quartiers ouvriers viennois, signées par les libéraux : « AIMEZ-VOUS : Scholten, Jelinek, Haupl, Peymann, Pasterk... OU : l’art et la culture ? » Les histoires que raconte Elfriede Jelinek la dissidente la rangent aux côtés d’écrivains comme Peter Handke et Thomas Bernhard. Avec des auteurs de cette trempe, la Mère Patrie en prend un coup. En 1996, Jörg Haider, qui mise sur l’anti-intellectualisme des habitants des quartiers populaires, la classe parmi les « Nestbeschmutzer », ceux qui salissent leur propre nid.
C’est avec son sixième roman La Pianiste, porté au grand écran par Michael Haneke, et triplement récompensé au festival de Cannes en 2001 (Grand Prix, Prix d'interprétation féminine et Prix d'interprétation masculine) que la France découvre la matricide, publiée longtemps par Jacqueline Chambon, jusqu’à ce que l’éditrice passe la main, rebutée par des traductions qui devenaient de plus en plus « lourdes, et difficiles », en plus de « l'agressivité permanente de ses livres », gênante. En 2004, l’Académie suédoise récompense son œuvre du prix Nobel de littérature, que Jelinek n’ira pas recevoir en personne, à cause de sa santé fragile : « Je n'irai certainement pas à Stockholm. La directrice de la maison d'édition Rowohlt Theater acceptera le prix pour moi. Bien sûr, en Autriche, on tentera d'exploiter l'honneur qui m'est fait, mais il faut rejeter cette forme de publicité. Malheureusement, je vais devoir écarter la foule d'importuns que mon prix va attirer. En ce moment, je suis incapable d'abandonner ma vie solitaire. » confie-t-elle alors au Courrier international. Au lendemain du sacre de son œuvre, une lettre parue dans le journal centre-gauche, le Süddeutsche Zeitung, suppute que si elle était née plus tôt, elle serait devenue kapo !
On peut lire les deux premiers chapitres du nouveau roman d’Elfriede Jelinek, Neid (Envie), qui ne connaîtra pas d’édition papier, sur le site de la romancière.
C’est ici.
Commentaires