Charles Dantzig n’en croit pas ses oreilles… Alors qu’il se divertit assis devant son petit écran, entre deux notices de son « dictionnaire égoïste », une petite phrase le sort de sa léthargie : « T.F.1, 27 avril 1999, 23H52, émission Célébrités. La présentatrice, qui je vous le jure n’avait pas l’air d’avoir écrit un livre sur les enjambements dans Les Fleurs du mal, introduit un sujet sur l’Orient-Express : " De lui, Valery Larbaud disait… " Et suit une citation des Poésies de A .O Barnabooth. Larbaud à la télé ! Dans une émission de show-biz ! Même en deuxième partie de soirée ! Valery, c’est gagné ! Your boat is coming in ! »
L’année où meurt Valery Larbaud, en 1957, les éditions Gallimard publient la majeure partie de son œuvre, sous le titre d’Œuvres complètes (dix volumes). On y trouve les tomes IX et X du Journal inédit – qu’on attend chez Gallimard en 2007, aussi complet que possible. Deux volumes de ce texte ont été publiés aux éditions Claire Paulhan, le journal de 1931-1932 (1998), et celui de 1934-1935 (1999)…
« Après une maladie, après aussi une expérience sentimentale dont on sort enfin libre, mais encore un peu "meurtri" (sinon infirme), on sent un beau jour revenir l’Envie de Travailler. On avait cru qu’on ne serait plus jamais capable de travailler. Mais enfin l’envie est revenue, elle est là. On s’éveille plus tôt, on se sent un tout petit peu mieux quoique très faible, mais il y a du soleil dans la chambre et on se lève. On commence par remettre de l’ordre sur sa table à écrire. Ce qui n’est pas l’affaire d’une seule journée. Une autre fois, on change les vieilles plumes rouillées des porte-plumes (c’étaient les plumes dont on se servait alors). Un autre jour encore, on achète quelques articles, tels que des feuilles de buvard, un crayon neuf, une gomme, etc. Vient enfin le jour où l’on se remet au travail. Alors un grand silence, un doux et pur silence, s’étend autour de nous. Nous avons retrouvé notre raison de vivre. » (Valery Larbaud, Journal inédit, cité par Enrique Vila-Matas, Mastroianni-sur-Mer, Passage du Nord/Ouest, 2005)
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