Du coq à l'âne

De la chute de cheval...

À l’époque où les pavés parisiens résonnaient du claquement des sabots des chevaux, un accident était vite arrivé. Balzac, bien trop lourd pour les suspensions trop souples de son tilbury, à force d’excès sensuels, a bien souvent versé dans les fossés des chemins. Pourtant, jamais ses chutes impromptues n’ont empêché le graphomane qu’il était de noircir la page blanche.

Toutes au Salon du livre ?

Glanée dans Livres Hebdo, une des publicités pour le Salon du livre qui se tiendra à Paris au milieu du mois de mars...  Minois beaucoup moins austère que l’atroce Porte de Versailles, qui ne manquera d’attirer chalands et badauds ! Quand l’édition ne sait plus à quel sein se vouer pour relancer un marché flasque, on s’en remet aux bonnes vieilles recettes du marketing glamour…

Illustres inconnus...

David Kessler, qui a succédé à la tête de France Culture à Laure Adler, partie pour le Seuil de La Martinière, dévoile, pour Livres Hebdo, la première nouveauté de la gille des programmes : Joseph Macé-Scaron, qui quitte le Figaro pour Marianne, animera à partir du mois de janvier une émission littéraire hebdomadaire « Jeux d’épreuves » : « On peut penser au « Masque et la plume » mais son émission est originale, je ne lui connais pas d’équivalent », assure Kessler… Le concept reste pour l’heure un peu flou même si l’on sait déjà que l’émission, conçue comme « un jeu d’épreuves » ( le Fort Boyard de la littérature ?) réunira à chaque fois quatre à cinq critiques qui ont pignon sur Seine :

Ironie tragique

A l’heure où Angelo Rinaldi quitte la tête du Figaro littéraire, comme nous l’explique le Nouvel Observateur , la petite vacherie de Daniel Garcia, dans l’album anniversaire du Masque et la Plume ne m’a pas échappé :

Qui a le monopole du "franc-parler" ?

Partir.
Comme il y a des hommes-hyènes et des hommes-
panthères, je serais un homme-juif
un homme-cafre
un homme-hindou-de-Calcutta
un homme-de-Harlem-qui-ne-vote-pas

l'homme-famine, l'homme-insulte, l'homme-torture
on pouvait à n'importe quel moment le saisir le rouer
de coups, le tuer - parfaitement le tuer - sans avoir
de compte à rendre à personne sans avoir d'excuses à présenter à personne
un homme-juif
un homme-pogrom
un chiot
un mendigot

mais est-ce qu'on tue le Remords, beau comme la
face de stupeur d'une dame anglaise qui trouverait
dans sa soupière un crâne de Hottentot?

Ces mots, ce sont ceux de l’homme du Cahier d’un retour au pays natal, ce sont ceux d’ Aimé Césaire… Aimé Césaire qui vient d’annoncer qu’il ne recevra pas Nicolas Sarkozy dont le déplacement est prévu jeudi prochain en Martinique : « Nicolas Sarkozy avait prévu un entretien jeudi matin avec le chantre de la "négritude" - concept né dans les années trente, en réaction au système colonial français. L'auteur de Toussaint Louverture dénonce un "piège" dans lequel "il ne tombera pas" : "Je n'accepte pas de recevoir le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy pour deux raisons. Première raison: des raisons personnelles. Deuxième raison: parce que, auteur du 'Discours sur le colonialisme', je reste fidèle à ma doctrine et anticolonialiste résolu. Je ne saurais paraître me rallier à l'esprit et à la lettre de la loi du 23 février 2005."

Il fut un temps où nos dirigeants français étaient moins empressés : En 2002, Jacques Chirac n’avait pas daigné représenter la France aux obsèques de Léopold Sedar Senghor. Senghor, l’agrégé de grammaire française, le professeur, le combattant puis le résistant, le ministre de la République Française, le poète, le membre de l’Académie française, le défenseur infatigable des droits de l’homme…

Coïncidence étrange, Finkielkraut, que Pascal Bruckner appelle « le Sarkozy des intellos » (périphrase plutôt avantageuse dans la bouche de l’écrivain) est un inconditionnel du poète de la négritude.

Des liens : Salon du livre 2006 et Elzé News

Le Salon du livre, qui se tiendra à la porte de Versailles au mois de mars prochain, a communiqué la liste des auteurs invités dans le cadre de la francophonie, thème mis à l’honneur cette année : c’est ici

Une brève de Livres Hebdo signale l’existence d’un portail d’information  sur l’édition française, Elzé News, continuant à appeler « site Internet » ce qui est un blog ! Lancé il y a trois mois par l’association des anciens élèves de DESS de lettres appliquées aux techniques éditoriales, le principe de ce blog est le suivant : « Avec de nombreux liens vers des articles parus dans la presse, le site est en fait une revue de presse des informations sur des maisons d’édition, des auteurs ou diverses manifestations liées à la profession.» Ça me rappelle un autre blog, mais je ne me souviens plus de son nom…

L'art d'être nègre

Le phénomène de la semaine pour Livres Hebdo s’appelle Douglas Kennedy. Catherine Andreucci, qui souligne que l’auteur n’est « plus publié dans son pays » s’est enquise auprès de Françoise Triffaux, directrice de Belfond, des raisons du désamour des Américains pour un des leurs. D’après elle, « l’écrivain a trop rapidement été enfermé dans un genre » : « L’homme qui voulait vivre sa vie était présenté comme un thriller par les Américains. Nous l’avons lancé différemment car ce qui m’intéressait, c’était son aspect existentiel. Quand Douglas Kennedy a voulu changer de genre, il n’a pas trouvé d’éditeur aux Etats-Unis. »

Si bien que l’auteur a fait de l’Europe une terre d’asile : « Il vit entre Londres et à Paris, et travaille à la fois avec Hutchinson, son éditeur anglais, et Belfond. » Mais fait remarquable, si les romans de l’écrivain, lorsqu’ils traversent l’Atlantique, changent de genre, ce sont les incipit de ses romans qui, en traversant la Manche, se modifient : « Le début d’Une relation dangereuse n’est pas la même en France qu’en Angleterre. » Etonnant, non ?

Sans transition, comme dirait l’autre, Jean-Claude Perrier dresse le portrait de Bernard Fillaire pour Livres Hebdo.

Prix littéraires : l'après-match

Quelle ne fut pas ma déception de ne pas trouver ce matin dans l’Equipe un compte-rendu exhaustif et épique du match Weyergans-Houellebecq ! Hier, à l’heure de l’après-match, je suis bien allée guetter les réactions des supporters des deux équipes. Mais je suis restée sur ma faim ! Chez les Antis MH, comme Pierre Assouline, je n’ai trouvé que persiflage de mauvais aloi : « Quand les résultats sont tombés, Weyergans a appelé sa maman, et Houellebecq son chien. C’est toute la différence. » Chez les Ultras MH, il faut le reconnaître, ce n’est guère plus brillant. Sur le forum du site officiel de Michel Houellebecq, on peut lire de commentaires du type : « Le Goncourt est donc une histoire belge et le Renaudot une affaire de brouteuse de minou - franchement ces prix littéraires on s'en fout.

Affligeant !
Pour ceux qui ne se « foutent pas des prix littéraires », ils s’amuseront beaucoup à observer la partie de bonneteau à laquelle se livre le jury du Prix Renaudot.

Jean-Jacques Brochier et Mickaël Haneke

Il y a un an, jour pour jour, mourait Jean-Jacques Brochier, le père des « Chroniques du Capricorne», publiées dans Le Magazine littéraire qu'il dirigea pendant plus de trente ans. Brochier pourtant encore à l’affiche, dans le dernier film de Mickaël Haneke, Caché. Si fondu dans le décor d’une émission littéraire sans âme qu’un site comme Allo Ciné l’oublie dans son casting prétendument « complet ». Emission littéraire par ailleurs rapiécée, selon les diktats de l’audimat, Philippe Besson coupé au montage parce que « trop théorique », Georges/Daniel Auteuil, « l’animateur littéraire », préférant gloser sur l’homosexualité de Rimbaud, sujet plus vendeur, plus attendu.

Quand on a demandé à Haneke pourquoi il avait réuni ces auteurs (Brochier donc, Besson, Pingeot, Teulé), il n’a pas caché son ignorance : « Je ne connaissais pas assez la scène littéraire française pour composer ce plateau télé. Je m'en suis remis à une amie éditrice. C'était amusant : peu avant le tournage, je leur ai demandé quel auteur on pourrait interviewer pour cette émission. Ils m'ont tous proposé François Weyergans, que je ne connaissais pas non plus. » Weyergans que Georges s’en va rencontrer à Aix-en-Provence, le présentant comme un auteur dont on attend depuis cinq ans la sortie du prochain livre…

Alors ? Des personnages critiques littéraires ou éditeurs ? Question de couleur locale pour séduire un public parisien « bobo à souhait » ? Permettez-moi d’en douter.

Les Gras et les Maigres

Dans son édito du 21 octobre, Christine Ferrand, rédactrice en chef de Livres Hebdo, résume en ces termes le classement des « 200 premiers  éditeurs français » : « Les gros se portent bien et même de mieux en mieux. C’est l’enseignement que l’on peut tirer une nouvelle fois de notre classement des éditeurs. Il confirme aussi que 2004 a été une bonne année pour l’édition française : le chiffre d’affaires de l’ensemble des 200 entreprises classées a progressé de 18%. Surtout, il montre explicitement que le chiffre d’affaires du secteur se concentre dans une poignée de maisons d’édition. En 2003, les douze premières réalisaient 75% du chiffre d’affaires total des 200 plus importants éditeurs. En 2004, cette proportion passe à plus de 17 %. »

Ces premières lignes m’en ont rappelé d’autres, moins journalistiques :